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Donnez du relief à vos idées de scénarios

Writing for emotional impactLes lecteurs les plus assidus de ce blog savent que j’ai récemment terminé la lecture de Writing for Emotional Impact de Karl Iglesias. Le livre regorge de conseils destinés aux scénaristes de cinéma pour améliorer leur art. Le but : s’assurer d’avoir suffisamment d’impact sur les lecteurs successifs pour que leur script soit transformé en film. Il suffit de remplacez « cinéma » par « jeu de rôle » pour se rendre compte qu’une bonne partie des conseils prodigués par Iglesias sont utilisables pour améliorer le prochain scénario que vous proposerez à vos joueurs ou que vous tenterez de publier en ligne, dans un magazine ou un bouquin de jdr. Voici donc une série de petites recettes qui peuvent transformer une idée de scénario qui paraît un peu plate en une accroche passionnante.

Notez bien qu’il ne s’agit en rien de techniques pour rendre votre scénario meilleur. On ne parle ici que de l’idée de base, de l’accroche, du concept qui est la base de votre histoire. Une fois que votre concept provoque chez vous le moment « wah, là j’ai une super idée », ce sera plus facile de le développer en un scénario complet. Évidemment, c’est surtout utile quand votre concept original n’est pas immédiatement attractif.

1. Qu’est-ce qui peut arriver de pire aux personnages ?

Si votre scénario est destiné à un type de personnages précis (des patients dans un hôpital, des pompiers, des G.I.’s en Irak), imaginez ce qui pourrait leur arriver de pire. Et voilà ce qui lancera votre scénario. Être hospitalisé, c’est pas cool. Être coincé dans un hôpital sans aucune issue tandis que le courant se coupe et que tous ceux qui meurent se relèvent sous forme de zombies, c’est autre chose. Jouer des pompiers qui risquent leur vie pour éteindre des incendies, ça peut être intéressant. Jouer ces mêmes pompiers alors qu’une bande de pyromanes s’attaque à la ville pendant une sécheresse qui rend l’eau très rare, c’est mieux. Jouer pendant la bataille de Tikrit, ça peut être sympa. Être coincés dans Tikrit sans lien possible avec le haut commandement tandis que les insurgés encerclent la ville, c’est plus excitant. Bref, trouvez ce qui pourrait être la pire situation pour les personnages, et plongez-les dedans.

2. Jouez sur les contrastes PJ / PNJ

ToyStoryLe cinéma et la télévision usent et abusent des couples improbables (L’arme fatale, Turner & Hooch, Die Hard 3, Toy Story, les séries Bones, X-Files et bien sûr True Detective). Réutiliser la formule avec les protagonistes (les PJ) en jeu de rôle est difficile. S’il y a des différences évidentes entre les personnages, ça ne peut pas être là un moyen de faire avancer une intrigue. Vous pouvez par contre contraster votre groupe de PJ avec les PNJ qui les entourent. Des héros doivent escorter un lâche, des soldats doivent s’encombrer d’un prisonnier ennemi, des personnages durs et sans cœur se retrouvent responsables d’enfants, etc. Les interactions entre PJ et PNJ constrastés rendront à coup sûr le scénario plus intéressant.

3. Contrastez les PJ et leur environnement

C’est la même technique que ci-dessus, sauf que le contraste se fait entre les PJ et l’environnement où se déroule l’action. Ici aussi le cinéma et la télé regorgent d’exemples: Jurassic Park (des enfants dans un parc infesté de dinosaures voraces), le flic de Beverly Hills (un flic des bas-fonds dans la société huppée), Crocodile Dundee (une citadine dans le bush australien, l’inverse dans le 2), la petite sirène (une sirène dans le monde de la surface), Firefly (Simon est un médecin de bonne famille forcé de s’acoquiner avec une bande de ruffians). Plongez vos PJ dans un environnement qu’ils ne connaissent pas, qui leur est hostile ou qu’ils détestent, et vous aurez une meilleure histoire. Des COPS hors de leur juridiction, des Shadowrunners dans la haute société bourgeoise, des aventuriers de bas niveau dans les Neuf Enfers, des samouraïs parmi les etas (intouchables), etc.

4. Mixez deux idées

Vous êtes un MJ normal, vous avez pleins d’idées. Prenez-en deux et voyez ce que le cocktail peut donner. Un exemple ? Un agent du FBI poursuit un tueur en série (déjà vu deux mille fois, pas intéressant). Un agent du FBI a un tueur en série comme mentor (déjà plus intéressant, mais seul, difficile d’en tirer une super histoire). Mélangez les deux, vous obteniez Le silence des agneaux. Difficile de dire que c’est pas  un putain de bon film… Alors pourquoi ne pas mélanger les deux idées suivantes: 1) des shadowrunners doivent voler des infos importantes dans un immeuble et les ramener à M. Johnson, de l’autre côté de la ville (déjà vu plein de fois, c’est le scénario-type de shadowrun) ; 2) il y a une coupure de courant générale, le black-out provoque pillages, chaos et émeutes dans la ville. Le mélange des deux peut être détonant, non ?

5. Changez un détail qui changera tout

ChinatownPrenez une histoire et changez-en le genre. Jouez Macbeth dans l’espace, et ça peut faire un bon scénario de Dark Heresy ou Star Wars. Reprenez l’idée de l’Inconnu du Nord-Express et placez-là dans le Japon médiéval. Vous aurez là une enquête difficile à Tenga ou L5A. Reprenez Chinatown et placez l’intrigue où vous voulez, ça fera toujours un bon scénario. La sécheresse peut être remplacée par une autre pénurie, le reste peut être repris tel quel pour une enquête délicate. Là, je pense à Wastburg, mais ça peut le faire aussi ailleurs. Laissez-vous aller…

6. Ajoutez un compte-à-rebours

C’est un des trucs les plus simples et les plus efficaces qui soient pour rendre un scénario excitant. Votre scénario plat (les PJ doivent accomplir leur but) devient soudainement intéressant si vous ajoutez le temps dans l’équation: les PJ doivent accomplir leur but avant que quelque chose de très grave n’arrive. L’exemple évident c’est la bombe à désamorcer, mais ça va beaucoup plus loin de ça. Repensez à des films comme Die Hard 2 (McLane doit reprendre le contrôle de l’aéroport avant que les avions, à cour de carburant, ne s’écrasent), Speed (la police doit arrêter un terroriste et désamorcer une bombe avant qu’un bus, en pleine heure de pointe, ne soit forcé de descendre sous les 80 km/h) ou La reine des neiges (une fois qu’elle a été frappée par le pouvoir d’Elsa, seul  un acte d’amour véritable peut sauver Anna avant qu’elle ne finisse figée par le froid). AliensRetour vers le futur24 heures chronoCendrillon… Vous voyez le truc.

7. Le choix de Sophie

Le choix de SophieCe bon vieux dilemme rend toujours une histoire passionnante. Sauver le roi d’une mort certaine ou combattre le dragon qui va raser le village ? C’est encore plus intéressant si des PJ ont juré allégeance au roi mais que la famille des PJ vit dans le village. Tenga et L5A offrent de nombreuses possibilités de dilemmes entre garder son honneur et faire ce qu’on doit ou bien faire ce qu’il faut mais perdre la face. Peut-on tuer dix personnes pour en sauver mille ? Oui ? Et si dans les dix il y a votre mère, votre ami d’enfance, l’amour de votre vie, votre senseï, le témoin dont vous avez besoin pour confondre un coupable ? Vos joueurs sortiront plus touchés par une histoire si elle comprenait des dilemmes cornéliens…

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Avec ces quelques trucs tirés du cinéma, vous avez des outils supplémentaires pour rendre vos idées de scénarios plus attractives. Reste bien sûr à mettre tout ça en musique, mais vous avez déjà franchi une étape importante, car vous avez maintenant un concept porteur. N’hésitez pas à commenter si vous avez déjà utilisé ces techniques, ou si vous en avez d’autres.


FATE, cékoidon? (3e partie)

FATE System ToolkitDans les 2 premières parties de la présentation de FATE (partie 1partie 2), nous avons évoqué tout ce qui fait de FATE un système de jeu un peu à part. Et pourtant il y a plus ! Car FATE permet de jouer dans de nombreux univers différents, en créant des façons de jouer en adéquation avec l’ambiance que vous recherchez. Voici comment un système à la base générique peut si bien correspondre à l’adage system matters

Création et adaptation d’univers

Dans le livre de FATE Core, vous ne trouverez aucun univers de jeu. Vous y trouverez cependant tous les outils et les conseils pour créer un univers, ou pour adapter un univers existant à FATE. Et tout ceci n’est pas une vague annexe en fin de livre. Non, le chapitre Game creation apparaît même avant celui sur la création du personnage.

Lorsque vous créez un univers pour jouer à FATE, vous passez par plusieurs étapes qui sont autant de questions à se poser. Le MJ ne fais pas ça seul dans son coin, comme c’est souvent le cas quand on prépare une campagne, mais avec les joueurs autour de la table. Les discussions peuvent ainsi faire évoluer l’univers vers des recoins insoupçonnés (imaginez, le MJ vient avec l’idée de faire un Space Opera à la Star Wars, mais pendant les discussions les joueurs s’orientent plus vers un mix espace et western et préfèrent jouer des mercenaires / contrebandiers / filous. Vous finissez avec Firefly…)

  • à quelle échelle le jeu se passe-t-il ? Les PJ vivent-ils des aventures dans une ville et sa région ou bien sauvent-ils l’univers entier ?
  • quels sont les problèmes inhérents à l’univers ? Un régime de dragons tyranniques, une malédiction, une guerre sans fin, l’arrivée d’une horde de zombies ? De base, vous choisissez deux problèmes que vous allez ensuite transformer en aspects. Ces aspects pourront être invoqués par les PJ et les PNJ pendant la partie, à n’importe quel instant. Par exemple, totalement au hasard: « Un empire galactique totalitaire » et « Une prophétie annonce un élu qui rendra l’équilibre à la Force. Il est où cet élu? ». Avec ces deux aspects, vous orientez déjà beaucoup votre univers de campagne.
  • Quels sont les protagonistes et les lieux importants de votre univers ? Les personnages importants avec qui vos PJ pourront interagir sont décrits en une phrase et accompagnés, vous l’aurez deviné, d’un aspect. Les lieux importants sont aussi décrits, mais n’ont pas d’aspect. Vous pourrez toujours en ajouter plus tard lorsqu’un scène s’y déroulera. Des exemple ? Toujours au hasard: Obi-Wan Kenobi, maître Jedi qui se cache sur Tatooine. Son Aspect « Je serai ton guide, jeune apprenti ». Les Stormtroopers de l’empire. Leur aspect « Tirent dans le tas mais visent mal ». La Cantina de Mos-Esley, le repère de tous les pires malandrins de la galaxie. Avec quelques personnages et lieux, vous voici avec rapidement de quoi démarrer votre campagne. Inutile de créer 50 PNJ à ce niveau, juste quelques-uns suffisent.

Cantina mos esleyUne fois ces étapes réalisées, il ne vous reste qu’à créer les personnages. Idéalement, les aspects des PJ les lieront aux lieux et personnages définis plus haut afin de créer une campagne cohérente.

On pourrait s’arrêter là, mais puisque les exemples donnés parlent de Star Wars, il est nécessaire d’adapter les règles de FATE à cet univers. Mais comment ?

Adapter la liste des compétences

FATE Core propose une série de compétences classiques. La première chose à adapter, c’est cette liste. Prenez Agone et comparez la liste de compétences à Shadowrun ou Vermine. Vous constaterez une différence évidente. Il vous faut donc trouver une liste de compétences liées à votre univers. Dans un med-fan, on sépare classiquement les compétences de combat en mêlée du tir. Dans Shadowrun, il vous faut une compétence pour la matrice, une autre pour la magie. Dans Vermine, les compétences liées à la survie et aux totems sont indispensables. Les compétences sont donc l’élément le plus simple et le plus évident à modifier pour adapter FATE à votre univers. Évitez de créer une liste à rallonge (comme dans Kuro) et restez générique. Une seule compétence Informatique suffit. Si vous voulez qu’un personnage soit spécialisé en piratage, ne créez pas une compétence mais utilisez plutôt un aspect comme « je craque toutes les protections informatiques ».

Créer des extras

Vous aurez remarqué que dans les deux premières parties de cette présentation, on ne parle pas de règles de magie, de super-pouvoirs, de véhicules, d’équipement spécifique. Tout ceci (et plus encore) sont des « extras », des règles à créer en partant des outils mis à disposition par FATE. Cette façon de faire porte le petit nom de règle de bronze, aussi appelée FATE fractal un peu partout sur la toile. La fractale dit ceci: n’importe quel élément de l’univers peut être traité comme s’il s’agissait d’un personnage. Il peut donc avoir des compétences, des aspects, des prouesses, des cases de stress et des conséquences.

Grâce à ces briques, vous pouvez créer à peu près n’importe quoi. Pour en revenir à Star Wars, il vous faut un système pour gérer les pouvoirs de la Force. À vous de décider: un personnage sensible à la Force devra-t-il obligatoirement choisir un aspect qui l’indique ? L’utilisation des pouvoirs est-elle liée à une compétences comme « Utiliser la Force » ? Chaque pouvoir est-il une prouesse ? Utiliser un pouvoir nécessite-t-il de dépenser un point de destin ? Toutes ces questions, FATE vous aide à y répondre en vous guidant pas à pas, en vous indiquant les conséquences de tel ou tel choix et en vous donnant moult exemples. Et si les exemples du bouquin ne vous suffisent pas, Internet regorge de propositions (comme ici avec une version de Star Wars).

mad maxLes extras peuvent ainsi être n’importe quel élément de l’univers qui nécessite un focus particulier. Vous voulez faire du Mad Max ? Il vous faut des règles sur les véhicules. Une voiture aura donc des aspects (moteur surpuissant, roues démesurées), des prouesses (coup de pare-choc: vous pouvez utiliser votre compétence de pilotage pour attaquer), des cases de stress et des conséquences pour gérer leur solidité. Vous voulez faire de la high-fantasy ? Il vous faut des extras pour gérer les armes magiques. On peut imaginer une prouesse pour indiquer son pouvoir, des cases de stress pour gérer ses points de magie, etc.

Evil Hat a publié le FATE Toolkit, ouvrage qui reprend toutes les possibilités de modification de FATE et la création d’extras, de nouveau avec les conseils et les exemples qu’il faut. Un compagnon indispensable pour qui veut mettre les doigts dans le cambouis.

FATE est donc comme un jeu de Legos. Vous avez toutes les briques pour construire le jeu que vous voulez. Le jeu est en outre servi par une mécanique de résolution très robuste, il a donc tout pour plaire. Je n’en ai pas parlé, mais le livre de FATE Core contient aussi des chapitres de conseils au MJ pour créer et jouer des scénarios et pour mener des campagnes. Même si on n’utilise pas FATE, ces chapitres sont d’excellentes lectures pour tous les MJ. Le tout va être traduit très bientôt en Français, il n’y aura alors plus d’obstacle pour se lancer à corps perdu dans l’échange de points de destin…

C’est ici que se termine notre présentation de FATE, en espérant que j’aurai titillé votre curiosité.

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Si vous avez créé, ou si vous connaissez de bons exemples d’extras ou d’adaptation d’univers, n’hésitez pas à partager en commentaire !


Jouer avec des « casual gamers »

Souvenez-vous, il n’y a pas si longtemps nous analysions ici même les différents types de joueurs et les motivations qui les poussent à revenir partie après partie à votre table. La dernière catégorie était le casual gamer, celui qui joue plus pour passer un bon moment entre amis en grignotant des chips que pour être le moteur de l’histoire. Et bien figurez-vous que l’un de mes groupes n’est constitué que de ce genre de joueurs. Oh bien sûr ils ont des tendances vers l’un ou l’autre type, mais ce sont principalement des casual. Cela implique différentes choses dans ma manière de gérer la table. Je m’en vais partager ici cette expérience avec vous.

Choisir le jeu

Boromir

Première caractéristique du casual gamer: il n’aime pas les règles compliquées. Il n’aime pas non plus les univers trop compliqués, les trucs alambiqués dans lesquels le rôliste moyen prend son pied. Exit donc les jeux tels que L5A ou Shadowrun, à la fois trop techniques dans leurs règles et trop riches dans leur background. D’autres exemples de jeux difficiles à placer à une table de casual gamers: Bloodlust Metal, surtout pour le système de jeu dont je ne pense que du bien, mais qui reste trop compliqué pour quelqu’un qui ne s’y investit pas ; Nephilim, ici par contre pour la trop grande richesse de l’univers de jeu ; et à la limite D&D, bien qu’un récent essai me fasse douter. En étant didactique, il y a sans doute moyen de jouer au grand ancêtre à condition de ne pas proposer le prêtre, le druide, le magicien ou le barde au plus casual des casual gamers.

À l’inverse, plusieurs jeux sont assez simples (entendons-nous bien, simples, pas simplistes) pour que la pillule passe facilement: Kuro a magnifiquement fonctionné, les règles n’étant pas trop complexes et l’univers horrifique facile à transmettre. Vermine s’est révélé idéal pour l’initiation, Les Mille Marches fonctionnent à merveille, INS/MV est passé sans problème, et nous terminons notre première campagne de Guildes sans le moindre soucis (même si ici j’ai du être très pédagogue pour expliquer l’univers de jeu). Sans les avoir essayés avec ce groupe, des jeux tels que l’Appel de Cthulhu ou Humanydyne devraient bien fonctionner aussi.

Maîtriser la complexité du scénario

Tout MJ rêve de faire jouer la Campagne Impériale, les Masques de Nyarlathotep, l’Assemblée du Seuil ou la campagne de COPS. Mais avec un groupe de casual gamers, ce ne sont sas doute pas de bon choix. D’abord parce que ce genre de groupe se réunit au mieux une fois par mois, et qu’il perd facilement le fil de la campagne. Ensuite parce que si vous les perdez dans une intrigue alambiquée avec de nombreuses pistes à suivre, vous les perdez pour de bon. Vous serez en effet amenés à passer plus de temps à expliquer ce qui se passe et à rappeler qui est ce PNJ rencontré il y a trois parties qu’à animer la partie. Enfin parce qu’ils sont plus enclins à suivre un bon gros fil rouge qu’à explorer de nombreuses pistes et différents arcs narratifs.

PatrickLe conseil ce serait de rester sur des one-shots ou des scénarios qui ne prennent pas plus de 5 ou 6 parties pour être démêlés. Quitte à en enchaîner plusieurs qui n’ont qu’un lien ténu pour donner le sentiment d’une campagne de longue haleine sans mettre en péril le plaisir du jeu parce que tout le monde a oublié cet événement fondamental qui s’est passé il y a 18 mois. Bref, keep it simple stupid (kiss), de toute façon ils ajoutent la complexité eux-mêmes.

Ne pas être trop exigeants

En tant que MJ, vous rêvez de joueurs impliqués, qui construisent une vraie personnalité pour leur personnage, qui écrivent 5 pages pour vous en expliquer l’incroyable historique, qui pondent son journal intime, qui vous aident à écrire les résumés des parties, et qui en plus amènent de la bière trappiste lors des parties. Sauf pour la bière, n’espérez rien de tout ça de vos casual gamers. En dehors des parties, pour eux, le jeu n’existe pas. Ils ne l’évoquent pas quand ils se croisent au boulot ou à l’école, ils ne relisent les résumés que vous devez écrire que si vous les encouragez harcelez, et en plus ils oublient les règles d’une partie à l’autre. Ils ne se souviennent pas toujours des PNJ les plus importants de votre scénario, ils oublient même parfois la composition de leur propre groupe. Mince, certains n’ont même pas de dés !

Quelle plaie me direz-vous. La solution vient de vous cependant. En dehors de faire preuve de votre plus impressionnante pédagogie pour atténuer ces « défauts », vous devez d’abord réaliser un travail sur vous-même et éviter d’en espérer trop. Si vous êtes conscients de la composition du groupe, que vous savez ce que vous pouvez en attendre et ce qui est trop pour eux, vous éviterez déception et frustration. Ensuite, il est encore possible, avec le temps, de transformer les casual en hardcore gamers, mais cette transformation est rare.

User de pédagogie

Le casual gamer oublie tout de partie en partie. Qu’à cela ne tienne, aidez-le à se souvenir. Ecrivez des résumés courts et simples de l’intrigue du scénario. Utilisez des visuels pour mettre un visage sur le nom des PNJ. L’utilisation d’un blog est une belle solution, qui vous permet en plus de renvoyer les articles pertinents aux joueurs avant chaque partie (ne doutez pas de l’efficacité de la messagerie Facebook…). Pendant la partie ne soyez pas trop pesants sur l’univers. Si un joueur oublie systématiquement qu’il y a deux soleils sur Cosme, à quoi bon s’énerver. C’est à vous d’instiller cette info dans son esprit dans vos dialogues et descriptions (« rendez-vous au lever des Feux-du-Ciel »), plutôt que de lui faire une remarque s’il parle du soleil.

Pareil avec les règles. Oui, ça peut être énervant de devoir rappeler comment on lance les dés lors à chaque test (oui, vous avez bien lu « chaque test »). Ici aussi, soyez pédagogue, didactique et sympa. De toute façon l’attitude inverse ne fonctionnera pas. Généralement, dans un groupe de casual gamers, il y en a toujours l’un ou l’autre un peu moins rebutés par les règles et les dés. utilisez-les comme relais. Pensez donc à les placer intelligemment à table pour qu’ils puissent à leur tour expliquer comment lancer les dés pendant que vous vous concentrez sur autre chose.

Lancer la partie en douceur

Vous êtes le genre de MJ qui arrive à la partie, déballe son matériel vite fait, et tandis qu’il déploie son écran, en ayant à peine esquissé un « bonjour », se lance dans la description de la situation initiale? Ça risque de ne pas passer avec les casual gamers. Rappelez-vous, vous vous réunissez mensuellement (au mieux). Certains se voient entre les parties, d’autres pas. Quoi qu’il en soit ils ont des choses à se dire. La dernière blague de mauvais goût sur les enfants et les épinards, la dernière connerie de leur chef au boulot, la dernière bagarre dans la cour de l’école, la prochaine trilogie Star Wars (n’essayez pas, en général le casual gamer ne sait pas qui est Boba Fett), ou quoi que ce soit d’autre. Tentez de couper court au discussions, et vous vous exposez à deux choses: les joueurs entrent dans la partie avec des pieds de plomb, et les anecdotes ressortiront plus tard, au plus mauvais moment, quand votre grand méchant entame son rituel qui réveillera les forces du mal. Bref, laissez faire, et gentiment remettez le jeu de rôle au centre de l’attention. Je vous conseille même de participer aux discussions, afin qu’ils vous voient vous, le MJ, comme un mec comme les autres, plutôt que comme un type à part un peu différent d’eux.

Ne terminez pas trop tard

Le rôliste hyper motivé, même fatigué, peut jouer jusqu’à 4 heures du matin si la partie le porte. Le casual gamer, à 23h00, ses paupières sont lourdes, il voit son nombre d’heures de sommeil auquel il aura droit avant de se lever demain diminuer, et il commence à ne plus suivre. Ne poussez pas le bouchon. Mieux vaut une partie courte où tout le monde a compris ce qui se passe plutôt que deux heures de plus pendant lesquelles vous n’allez plus jouer qu’avec les plus motivés et où vous aurez perdu tous les autres. Dans mon groupe, dès qu’il est 22h30, je réfléchis au meilleur endroit où terminer la partie, de préférence sur un bon cliffhanger, et je m’arrange pour que cette fin arrive dans les 30 à 45 minutes qui suivent. Il arrive que je le sente plus en forme, auquel cas je peux pousser un peu, mais c’est plutôt rare.

Une dernière mise au point

On pourrait croire à la lecture de l’article que les casual gamers sont des rôlistes « mineurs », peu intéressants pour un MJ. Que nenni non point ! Mes parties avec ce groupe me procurent un immense plaisir. Les efforts que je dois déployer pour qu’ils apprécient de jouer font de mois un meilleur MJ. Et si le trait est un peu grossi dans l’article, je dois tout de même les remercier parce que tout fonctionne à merveille. Et puis, le groupe tient depuis quelques années maintenant. Et même les plus casual d’entre eux reviennent à chaque partie. Ce sont donc bien de vrais rôlistes, authentiques, de cette race de bons rôlistes qui chassent la galinette cendrée…

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Et vous, avez-vous à votre table l’un ou l’autre casual gamer ? Comment les gérez-vous ? Avez-vous réussi à en transformer un en hardcore gamer ? Dites-nous tout en commentaire !