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Index Card RPG – Un bijou à découvrir

Index card rpgIl y a des jeux qui ne font rien pour que vous y jetiez un œil : ils ont un titre à chier (non, sérieux, « Index Card RPG » donne l’impression que c’est un jeu où l’on incarne des cartes de visite) et, de loin, ils ressemblent à la foultitude de clones de D&D qu’on trouve sur le net. Et pourtant, outre qu’il est un bon jeu, ce petit ovni qu’est ICRPG regorge de bonnes idées que l’on peut piller pour toutes nos parties. L’auteur nous y encourage, même, alors pourquoi se priver ?

Index Card RPG en deux mots

C’est donc, au premier regard, un clone de D&D. Six caractéristiques qui donnent un bonus au d20 que vous lancez pour atteindre une difficulté. Jusque là, rien de neuf. Votre personnage a une classe, du genre archer, prêtre ou mage, toujours rien de neuf. Mais la comparaison s’arrête là. Impossible de faire le tour de tout ce qui caractérise ce jeu, je vous encourage à la lire pour ce faire (16 $ sur Drivethrough, mais il existe un quickstart gratuit pour vous faire une idée). Par contre, attardons-nous sur quelques petits trucs qui peuvent être réutilisés dans d’autres jeux.

Le jet d’effort

On connait tous ça : en combat, je lance le dé pour attaquer, et si je touche, je lance mes dés de dégâts pour voir combien de points de vie perd mon adversaire. Quand j’aurai accumulé assez de dégâts au fil des tours, mon adversaire sera mort. ICRPG propose de tout jouer comme en combat pour toutes les actions, et de généraliser l’habituel jet de dégâts, qu’il renomme jet d’effort. Je sens que vous avez besoin d’un exemple ou deux, j’y viens, mais je dois encore préciser une chose : le type de dé du jet d’effort dépend de la manière dont vous accomplissez votre action. De base, c’est 1d4. Les dégâts des armes font 1d6. La magie permet un effort à 1d8, et chaque personnage a aussi un score d’effort ultime à 1d12 utilisé après un 20 naturel. Évidemment, ces scores d’effort de base peuvent être améliorés à la création du perso et par la suite.

Mais je vous avais promis un exemple : Le voleur tente de crocheter la porte. C’est une serrure magique bien conçue, elle a donc l’équivalent de 20 points de vie. Tour 1, le voleur lance son jet de dextérité. Il réussit, il lance donc son jet d’effort (1d4+2 par exemple). Il obtient 4. Il devra donc réitérer son jet dans les tours prochains jusqu’à ce qu’il ait accumulé 20 points d’effort pour « vaincre » la serrure. Si au deuxième tour il fait 20 à son jet de dextérité, il pourra lancer son dé d’effort ultime, soit 1d12, ce qui lui permettra peut-être de progresser plus vite. La mécanique fonctionne tout autant si un personnage veut déchiffrer un vieux codex, s’il recherche des informations sur un gangster sur les docks, s’il escalade une falaise, s’il dresse un animal, s’il construit un château, etc.

Et je vous entends déjà me dire que c’est un peu chiant de lancer plusieurs tests pour accumuler de l’effort alors qu’on peut faire un simple test et décider du succès. Et vous auriez raison, si le jeux ne proposait pas deux autre mécaniques qui, utilisées de concert, rendent les choses bien plus intéressantes…

Le jeu « tour par tour »

En combat, nous avons l’habitude de découper le temps en rounds pendant lesquels chaque personnage joue à son tour. Ici aussi ICRPG propose de tout jouer comme en combat. On joue donc toujours en tour par tour, sauf que, évidemment, la durée du round varie selon la situation. Elle peut être comptabilisée en moments (pendant un combat, une course poursuite, etc.), en heures (réparer une armure, se soigner, déchiffrer un parchemin) ou en jours (construire un bâtiment, créer un objet magique, entraîner une armée, voyager vers un pays lointain, etc.)

Chaque personnage peut donc, à son tour, réaliser une action et accumuler de l’effort dans le but de terminer sa tâche. Je vous sens encore d’humeur à vouloir un exemple : deux personnages arrivent dans leur village natal après une aventure trépidante mais épuisante. Le MJ a prévu que ce sera l’occasion pour les personnages de se ressourcer, il annonce que les rounds durent désormais un jour. Au premier tour, le guerrier retourne à la forge de son père. Il y découvre que ce dernier est malade et qu’il a pris un apprenti un peu maladroit. Le guerrier déclare au MJ : j’utilise mon tour pour former ce petit gars à la forge. le MJ décide qu’avec un peu de pratique, l’apprenti y arrivera : c’est une tâche à 10 PV. Le joueur lance son jet de charisme, qu’il réussit. Comme il s’agit de forger des armes, le MJ lui autorise à lancer un jet de dégâts d’armes pour son effort. 1d6+2 = 4. Au soir du premier jour, l’apprenti commence à apprendre mais il y a encore du boulot. Le deuxième personnage est le magicien. Il a ramené de ses aventures un vieux grimoire poussiéreux qu’il décide de déchiffrer. Le MJ sait que ce livre est un enjeu important de sa campagne. Il déclare une tâche à 40 points de vie. Au fil des tours (et donc des jours), le magicien accumulera de l’effort jusqu’au déchiffrement complet du grimoire.

Et là, de nouveau, vous vous dite « OK, mais ça sert à rien, un seul test aurait pu suffire : soit l’apprenti est formé, soit non, et le grimoire est déchiffré ou pas ». Certes, mais c’est sans compter sur notre troisième mécanique…

Le timer

On vous la fait depuis toujours au cinéma : la bombe va exploser dans 42 secondes, l’étoile noire sera à portée de tir dans une minute, etc. Le timer d’ICRPG a le même effet : décider d’un événement qui va tout bouleverser et provoquer un rebondissement.  Le timer est un d4 que le MJ lance à la vue de tous (il relance les 1). Dans un nombre de rounds équivalent au score obtenu, quelque chose va se passer. Parfois les joueurs savent quoi, parfois pas. Ça peut être un truc que le MJ a prévu, ou bien un événement qu’il va improviser. Quoi qu’il en soit, quelque chose d’important va se passer. Dans notre exemple ci-dessus, la ville pourrait être victime d’une terrible inondation causée par la fonte trop rapide d’un glacier (ce qui conduira les personnages à essayer de comprendre pourquoi). 1d4 rounds, donc dans cet exemple, 1d4 jours. Les joueurs voient ce d4, ils savent que quelque chose arrive. Du coup, ça devient plus important de savoir si l’apprenti sera formé à temps ou si le livre sera déchiffré (OK, surtout le livre, je vous l’accorde).

La magie du truc, c’est que ça marche pour tout. Dans 1d4 rounds…

  • le piège recrache de l’acide dans la pièce (c’est donc important de savoir si le voleur ouvre la porte à temps ou pas)
  • le dragon souffle de nouveau (c’est donc important de savoir s’il sera vaincu avant)
  • un nouveau robot tueur s’anime (les personnages auront-ils désactivé le serveur à temps ?)
  • le pont s’effondre (les personnages auront-ils traversé ?)
  • la porte se referme (tous les otages auront-ils eu le temps de fuir ?)
  • le portail vers l’enfer s’ouvre (le rituel de protection sera-t-il terminé ?)
  • les croiseurs du Nouvel Ordre arrivent (la résistance aura-t-elle évacué sa base avant ?)

Et on peut même combiner plusieurs timers : imaginez une décompte pour savoir quand le pont va s’effondrer, quand des renforts vont arriver et quand le dragon pourra utiliser son souffle à nouveau. Vous pouvez même vraiment foutre le bordel en utilisant des timers en rounds mais aussi en tours. Baissez le score du d4 à la fin du tour de chaque joueur. Vous parlez d’un sentiment d’urgence !

L’important c’est de toujours avoir un timer. Ainsi les joueurs vont à l’essentiel, on évite les longs moments où les persos font du shopping et partent tous azimuts sans que rien ne se passe. Si je sais que j’ai trois jours avant un événement important, je vais me focaliser sur ce que je juge prioritaire. En combat, si vous avez un enjeu lié à un timer, ça rend les scènes tout de suite plus tendues. Un bon outil pour créer des scènes mémorables !

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Il y a encore beaucoup à dire sur Index Card RPG. On pourrait parler de la difficulté unique par rencontre, du système de distances utilisant une banane (si si !), de la maquette géniale, de la qualité des textes qui en font un modèle d’explication de règles, des conseils pour créer des rencontres ou des scénarios, des cartes illustrées qui donnent son nom au jeu. Nous y reviendrons donc certainement dans un prochain article.

Et vous, avez-vous lu ICRPG ? Qu’en avez-vous pensé ? Dites-nous tout !